Quelle question ! Un habitat écologique peut-être une maison éco-construite ou éco-rénovée, un habitat collectif, auto-géré ou pas, inscrit ou non dans un éco quartier … .
On parle de plus en plus de ces notions d’éco-construction, éco-rénovation, de matériaux renouvelables, de bâtiments durables, Bâtiment à Basse Consommation (BBC), de labels tels que Passivhaus, Minergie (2 labels étrangers avec délégation en France), E+ C-. Reconnu Garant Environnement (RGE, autre sujet déjà abordé ici, 2 fois, avec un article à suivre qui proposait des solutions au RGE), et encore beaucoup d’autres. Le carbone est aussi un point souvent abordé, mais est-il appréhendé correctement, nous avons posé cette question ici dans un article original, Carbone, et si on se trompait de combat ! et deux autres relayés : est-ce une préoccupation des français et un sur 4 actions possibles).
Malgré la multitude d’articles dédiés, peu de gens, médias, professionnels semblent s’être réellement penchés sur cette question.
Même des organismes officiels tels que l’AQC, le CSTB, un ministère ou une commission n’ont pas écrit quoi que ce soit de probant à ce sujet !
Nous vous proposons, via cet article, de poser les bases de ce que nous, nous imaginons derrière ces mots magiques : habitat écologique.
Nous vous conseillons de prendre en compte le plus possible les critères évoqués ci-après.
En première partie, vous trouverez les points importants dans les 4 rubriques qui constituent ce que nous appellerons les 4 piliers de l’habitat écologique.
La seconde partie développe plus en détail le contenu de chacun.
Les impacts d’un habitat sur l’environnement
A l’évocation d’un habitat écologique, chacun pense immédiatement aux aspects matériaux, équipements intérieurs, modes de chauffage, niveau de performance en terme d’isolation, et c’est bien, mais est-ce suffisant ? Quels autres points peuvent avoir un impact sur l’environnement ?
Critères indirects mais directement impactants
Nos déplacements, ils dépendent du lieu d’implantation
Notre appartement, notre maison, sont le lieu dans lequel nous résidons en dehors de nos temps d’occupation extérieure (travail, sport, détente, courses, cours, soins divers, échanges de convivialité sociale tel que participation à des associations …). Plus cet espace de vie sera éloigné de ces “lieux externalisés”, plus notre impact inhérent à nos déplacements sera élevé, moins il sera écologique.
Ce point est assez délicat car il est difficile de connaître l’avenir et tel lieu proche d’un point rallié couramment, sera éloigné d’un autre point qui pourrait se substituer au 1er (changement de travail, changement de lieu d’études des enfants, …).
Il est possible, pour limiter ses déplacements, soit de créer ou développer son emploi / activité à la maison, soit de proposer à son employeur de réaliser sa mission en télétravail.
Consommation d’espace, disparition d’espaces naturels
Les distances de déplacement vont “justifier” des voies de déplacement. La dissémination des constructions, leur mitage, vont engendrer une consommation de foncier, bien souvent initialement agricole. Ces espaces de production consommés sont un impact sur l’environnement.
Atteintes aux biotopes, appauvrissement du milieu
Est-il nécessaire de disposer toujours d’espaces bien propres, pas de feuilles qui traînent, les pieds exempts de terre pour entrer à l’intérieur, la voiture toujours impeccable peuvent inciter à bétonner ou “goudronner” les aires d’accès et de stationnement. Ces ensembles étanches à l’infiltration d’eau dans le sol sont autant de source de captation et d’évacuation des eaux de pluie, au risque de générer des pics d’arrivée dans les cours d’eau, ce qui peut engendrer des débordements et/ou des inondations. La recherche de haies bien droites, toujours feuillées l’hiver afin de définir l’espace privatif peut se faire à base d’essences non indigènes. Encore des atteintes à l’environnement et à sa biodiversité. Tout cela est-il primordial ?
Equipements induits, possibles sources de pollutions diverses
La pelouse bien tondue, sans un brin d’herbe, sans une feuille qui dépasse ou traine, avec des tontes très régulières l’été, un souffleur l’automne, des terrains super bien entretenus mais où la vie de petits ou micro-organismes est de fait réduite, biotope perturbé, moins d’oiseaux, … Pollution sonore d’un côté, disparition de biodiversité d’un autre, pas top non plus pour l’environnement.
La dimension de l’habitat
Il va de soi qu’une construction de grande dimension mobilise plus de ressources pour sa construction ou son entretien qu’une autre de taille plus modeste. Elle nécessite aussi plus de main d’œuvre.
Son entretien nécessitera également plus de matériaux et de main d’œuvre.
Elle collectera plus d’eau de pluie qui, si elle est stockée et utilisée, sera une ressource pour des utilisations diverses. Cependant, dès lors que les réservoirs seront pleins, cette eau rejoindra le système général de collecte des eaux de pluie, accentuant ainsi les apports rapides et importants dans les rivières, facteur aggravant au plan des inondations.
La consommation d’énergie pour chauffer un grand volume est forcément plus importante que celle nécessaire pour un plus petit. Il en va de même pour une éventuelle climatisation.
Critères classiquement pris en compte
Les matériaux
Un bâtiment, individuel, collectif, tertiaire ou autre ne peut se construire ou avoir été construit sans matériaux, sauf peut-être un habitat troglodyte, et encore, il faudra bien des menuiseries et des éléments de second œuvre (électricité, peinture, revêtements de sol …).
L’origine des matériaux
Les matériaux choisis peuvent être d’origine renouvelable ou d’origine fossile. Forcément leur impact sur l’environnement ne sera pas de même niveau.
Certains émettront des gaz à effet de serre, d’autres moins. La seule émission n’est d’ailleurs pas suffisante pour apprécier le niveau d’impact environnemental. Par exemple, en ce qui concerne le CO2, il n’est pas à considérer de la même façon selon qu’il est issu d’un matériau d’origine renouvelable ou d’origine fossile.
La proximité est importante : l’utilisation d’une ressource locale est, généralement, à privilégier.
L’impact environnemental des matériaux
Quelque soit leur origine, les matériaux seront soit prélevés (par exemple : terre pour du pisé), soit transformés, même un minimum (bois, paille, …), parfois transportés. Plus la transformation est importante, plus le transport se fait sur une longue distance, plus l’impact sera grand.
Ils seront plus ou moins émetteurs de gaz à effet de serre, de carbone entre autres. Certains en émettent moins qu’ils en ont piégé (par exemple le bois ou ses dérivés : ils ont piégé du carbone au cours de leur croissance). Aussi longtemps qu’ils seront conservés dans leur nature de bois, c’est à dire non brûlés, non compostés ou non méthanisés, ils piègeront ce carbone.
Il est aussi évident qu’un habitat construit avec des matériaux natifs tels que le bois, la terre , l’isolation avec de la paille, de la ouate de cellulose, et tant d’autres, permettra de réduire notre impact sur l’environnement. Pour beaucoup, ces matériaux s’inscrivent d’ailleurs souvent dans des techniques et savoir-faire anciens.
La durée de vie des matériaux n’est pas éternelle, seront-ils recyclables en fin de vie ? S’ils le sont, le process est-il bien maîtrisé, simple, non impactant lui-même ? Le produit issu du recyclage est-il vertueux, performant, pertinent ?
Si nous devions donner une ou deux pistes simples, ce serait (hormis bien sûr si des solutions plus écologiques ne peuvent leur être substituées) :
– évitez les produits issus de la pétrochimie, de nombreux articles publiés ici éclairent leurs limites, ceci au-delà de certaines performances exceptionnelles que nous leur reconnaissons bien volontiers,
– évitez les produits nécessitant une cuisson à haute température (très forte consommation d’énergie grise), entre autres le ciment Portland et, si vous pouvez les éviter, les briques de terre cuite. Nous avons abordé ici à plusieurs reprises le cas du ciment, particulièrement dans un article intitulé “Comment les cimentiers nous mentent avec de vraies infos !”
Energie et ressources diverses, recherche d’autonomie
Quelque soit l’implantation de notre appartement ou notre maison, nous consommons pour l’exploiter, l’habiter.
Ces consommations ont, elles aussi, des impacts sur l’environnement et les autres êtres vivants.
Nos divers besoins selon les fonctions
Lors de l’exploitation d’une espace habité nous faisons appel à des systèmes qui, eux-mêmes, font appel à des ressources extérieures.
Besoins pour le chauffage
Un rappel de base : chauffer c’est compenser les pertes de calories.
Les pertes s’opèrent via les parois extérieures, opaques ou non. Un appartement comportera toujours moins de surface de parois extérieures, à volume équivalent, qu’une maison. Il sera donc toujours plus pertinent, sur ce plan, de faire le choix du collectif plutôt que de l’individuel.
Nous avons, humains, développé de nombreux matériaux et principes qui nous ont permis de croitre en niveau de confort. Cependant ce gain de confort est encore trop souvent coûteux au plan environnemental, à commencer par les climatisations.
Besoins en éclairage
Bénéficier d’un bon éclairage est fort agréable. Il était, autrefois, souvent faible, voire très faible, avec peu de menuiseries et de petite taille. Les anciens vivaient beaucoup plus qu’aujourd’hui au rythme du soleil. Les ampoules de dernières générations ont permis de réduire l’impact de ce besoin.
Besoin en eau
Est-il normal de considérer que l’eau, ce bien précieux, vital, soit à disposition en permanence dans nos habitats, sans aucune limite de quantité ou d’utilisation ? Disponible à l’intérieur, c’est une réalité qui ne changera pas de sitôt, et c’est heureux. C’est d’ailleurs assez peu coûteux au plan énergie. Par contre, en quantité, rien n’est moins sûr, ou alors à un prix de plus en plus élevé et peut-être de qualité moindre.
En effet, les modes de culture, les pratiques industrielles, nos propres rejets, chargés de divers éléments très difficiles à séparer du précieux liquide rendent son traitement de plus en plus difficile.
Et que penser de la façon dont nous la consommons : 25% pour recevoir et propulser nos déjections, 25% de notre eau potable “gaspillée” dans nos toilettes !
Les réponses possibles aux besoins
Dans l’idéal, un habitat et ses occupants devraient pouvoir être autonomes.
C’est possible, en tout cas ça l’a été longtemps. Les temps ne sont pas si éloignés où il n’était pas envisageable d’acheter la quasi totalité de ce qui est nécessaire à notre survie : alimentation, éclairage, chauffage, protection contre les éléments, …
Ce qui semble évident, c’est que limiter ces besoins au minimum nécessaire est la voie royale pour tendre vers l’autonomie.
Un mouvement de retour à une certaine autonomie se dessine. Comme souvent, attirés par l’absolu, les tentations sont grandes de tendre vers la possibilité d’exclure tout recours à une dépendance quelconque.
La frontière entre l’autonomie et l’autarcie est ténue et il ne faudrait pas, au nom de cette autonomie, mettre tellement de systèmes en place que jamais ils ne produiront autant qu’ils ont consommé à leur fabrication et mise en place. Ne pas, non plus, aller jusqu’à se couper de tout lien avec le reste de la cité, les voisins, la société, tout simplement.
En fonction du niveau d’autonomie choisi, l’indépendance aux réseaux et/ou achats divers a souvent pour corollaire une assez grande dépendance à la gestion locale de l’eau, de l’alimentation, du chauffage, de l’habillement, de l’énergie …
Une présence régulière peut s’avérer nécessaire. Il faut aussi, souvent, consacrer beaucoup de temps à cette gestion, ce qui peut avoir une incidence sur le temps disponible pour l’activité professionnelle et imposer un travail rémunérateur à temps partiel.
Quels sont nos objectifs vis à vis de notre habitation ?
Salubrité
Qui voudrait être malade ou voir les occupants d’une maison ou d’un appartement tomber eux-mêmes malades du simple fait d’habiter un lieu malsain ?
Personne, nous n’en doutons pas. Et pourtant, de nombreux rapports mettent de plus en plus souvent en évidence que nos habitats sont loin, parfois même très loin, d’être un lieu propice à une vie saine.
COV dites-vous ?
On nous parle de classement COV (Composés Organiques Volatiles). Si autrefois de telles “étiquetages” n’étaient pas nécessaires car les matériaux et équipements divers ne présentaient pas de risques, ce n’est plus le cas aujourd’hui et c’est donc bien que le législateur ait imposé de nouvelles normes … mais sont-elles sérieuses ? est-ce suffisant ? nous dit-on tout ? mesure-t-on tout ce qu’on devrait ? Nous avons déjà abordé ce sujet ici.
Emanations toxiques
De nombreux matériaux laissent émaner des vapeurs toxiques, non prises en compte dans les COV, soit du fait qu’elles ne sont pas l’une des 10 répertoriées au milieu des centaines d’autres, soit parce qu’elles sont émises au-delà de la plage de recherche des COV (23° +- 2°). Nous pensons, entre autres et particulièrement, aux émanations suite à la montée en température au sein d’un incendie (vidéo).
Ondes et champs électriques
Le développement des réseaux, tant électriques du fait des lignes de transport que ceux de la téléphonie et tant d’autres nous soumettent à des expositions qui, il y a un siècle, n’existaient pas. Notre organisme est-il en capacité de gérer ces “bombardements” ?
Nous pouvons éviter de nous implanter à proximité des lignes électriques (certains conseillent un recul de 1 mètre par 1 000 volts).
Vapeur d’eau et condensation
Nous vivons de plus en plus enfermés dans des lieux confinés, à commencer bien sûr par nos maisons et/ou appartements, mais aussi dans les moyens de transport, en faisant nos courses au sein de grands espaces fermés, au travail, tant dans les ateliers que dans des bureaux, …Tous ces espaces sont de plus en plus chauffés et étanches par rapport à l’extérieur, ce qui est normal puisque nous y cherchons le meilleur confort au moindre prix.
Nos activités, notre occupation, y génèrent de la vapeur d’eau en grande quantité. Si celle-ci est mal gérée, si l’air est mal renouvelé, si les parois extérieures ne la laissent pas perspirer, si la température extérieure est inférieure à celle de l’intérieur, ce qui est souvent le cas l’hiver, alors cette vapeur d’eau se condense. Cette condensation s’appelle un point de rosée.
Qui dit rétention régulière d’eau en un point donné sous une température suffisante dit, inévitablement, moisissure, champignons. Et qui dit moisissure ou champignons dit émission de spores, lesquelles sont très allergisantes. La non maîtrise de ces points est cause de nombreuses maladies des voies aériennes, rhumes, rhinites, pharyngites et autres.
Il nous faut prendre soin à ne pas gêner la nécessaire maîtrise de l’humidité relative.
Ceci peut être favorisé d’une part via des parois perspirantes (dans les immeubles ou maisons anciens à murs initialement perspirants, quelque soit leurs performances par ailleurs. Il faut s’interdire l’emploi des matériaux non perméables à la vapeur d’eau et s’imposer l’installation d’un système maîtrisé de renouvellement d’air.
Confort
Nous souhaitons évidemment nous sentir bien dans nos intérieurs, une partie de ce “bien” est ce que nous appelons le confort, notion très difficile à définir.
Le confort correspond à un ressenti de bien être, un juste équilibre de la température ambiante, de la température des éléments qui nous entourent, tant des parois que des équipements, ainsi qu’à la stabilité de la température. L’air doit également être stable et l’hygrométrie correcte.
Les matériaux les plus propices à ce ressenti sont, le plus souvent, d’origine bio-sourcée .
Entretien aisé
Toutes les bâtisses se dégradent dans le temps. Ceci est dû à la vie et au vieillissement des matériaux tout autant qu’à l’usage que nous en faisons.
Pour leur conserver leurs performances ainsi qu’un aspect agréable, nous devons en assurer l’entretien. C’est un aphorisme que de dire que plus les matériaux seront durables et moins l’immeuble nécessitera qu’on l’entretienne. C’en est un autre que dire que plus les matériaux seront aisément réparables ou entretenables, moins il sera nécessaire de les changer. Nous devons donc sélectionner le plus rigoureusement possible ce que nous utilisons pour l’édification ou l’entretien de nos habitats.
Se nourrir
Manger est un besoin vital. Nous devrions en tenir compte lors de l’implantation d’une maison ou d’un immeuble sur son terrain d’assiette afin, entre autres, de ménager l’espace nécessaire pour la création d’un jardin, privatif ou collectif.
La conception d’un immeuble ou d’une maison devrait, autant que faire se peut, intégrer une serre ou un espace dans lesquels il serait possible de pratiquer l’aquaponie ou une production de légumes. De plus en plus d’occupants ont une ou deux poules, ce qui réduit considérablement le volume de déchets en plus d’avoir des œufs frais.
Conclusion
Cet article n’a pas vocation, à lui seul, à permettre de répondre à toutes questions liées à ce qu’est un habitat écologique, pas plus qu’à donner toutes les solutions.
Il serait d’ailleurs impossible de prétendre à une exhaustivité dans ce domaine tant les impacts et les solutions possibles sont nombreux et variés. Il ne se veut pas plus que interpeller et, soit être le petit caillou dans la chaussures qui va empêcher de …, soit représenter la sucrerie qui va inciter à …
Bonjour CLAUDE,
Merci pour ce bel article. C'est toujours très i ntéressant.
Dommage que je n'ai pas plus de temps & des soucis de vue !!
Amicalement
Marinette
P.S. : je ne comprends pas l'anglais, hélas !!!
Bonjour Marinette,
Le temps nous manque à tous, il est d’autant plus important de l’utiliser efficacement.