Acheter une maison est un acte qui implique beaucoup de questions préalables, qui présente parfois des risques, des surprises, il ne manquerait plus que d’y ajouter un mille feuilles administratif !
Et si ce mille feuilles était là pour protéger les acheteurs ?
C’est vrai que le mot “administratif” est plus souvent connoté porteur de contraintes que porteur de sécurité … et pourtant !
Alors, qu’en est-il de ce qui serait obligatoire ou qui ne le serait pas mais pourrait s’avérer utile ?
Nous vous proposons, via cet article, un passage en revue de tous les documents administratifs qui seront nécessaires et de ceux qui, bien que facultatifs, pourraient éviter des galères … Il restera bien assez de sources d’inconnu avec l’état de la maison, ses besoins en travaux, reprises, améliorations et autres, alors autant “blinder” ce qui peut l’être.
Préalable
Autrefois, il y a 50 ans ou plus, disons, simplement, avant le milieu du siècle dernier, une transaction était totalement différente de ce qu’elle est devenue.
A l’époque, pas d’agence immobilière, pas de revues ou journaux spécialisés, encore moins de site internet bien évidemment, tout au plus était-il possible de trouver une ou deux annonces pour des propriétés de prestige dans “Jour de France” ou autres revues équivalentes et quelques annonces pour pavillons de chasse dans “le Chasseur français”.
On achetait soit par relation, par bouche à oreille, soit en s’informant des biens à vendre chez le notaire officiant dans la région.
Acheter une maison, c’était simplement acheter des murs construits selon le savoir-faire local, avec un toit, une couverture et des menuiseries traditionnelles.
Pas ou peu d’équipement intérieur : pas de salle d’eau, quelques points lumineux, une ou deux prises, pas d’isolation, chauffage au bois ou au charbon dans un poêle ou une cuisinière, un enduit terre ou plâtre au mur, un badigeon, parfois du papier peint et voilà, on a le descriptif exhaustif de tous les biens.
La maison ne recelait pas de pièges, tout était visible. En cas de désordre, celui-ci était facilement identifiable et évaluable en terme de coût de remise en ordre.
Puis, au fil des évolutions, sont apparus des pathologies qui ont frappé les occupants et/ou les œuvrants : le saturnisme suite à l’ingestion de plomb, maladies professionnelles liées aux vapeurs de plomb chauffé. De nombreuses personnes ont développé des handicaps, d’autres en sont mortes, le législateur a éprouvé, à, juste titre, le besoin de légiférer.
Il était difficile d’imposer une visite générale pour tous les bâtiments, ce sont les changements d’occupants qui ont été ciblés : changement de locataires et/ou de propriétaire. Les 1ers diagnostics voient le jour. Nous allons, ici, nous arrêter à ceux qui concernent les transactions de maisons individuelles.
Administratif : ce qui est obligatoire
Certains diagnostics sont obligatoires pour finaliser une transaction. Ils peuvent être informatifs ou déclencher des obligations d’intervention préalables à l’emménagement des futurs occupants.
A ce jour, mi-2018, ils sont au nombre de 9 (certains ne concernent que des zones ou régions particulières). Ils doivent être fournis au notaire sous la forme d’un Dossier de Diagnostic Technique (DDT), lequel réunira tous ces documents. Ce DDT sera annexé aux actes.
Diagnostic de Performance Energétique (DPE)
Le DPE a, comme son nom l’indique, pour objectif de connaître le mieux possible les performances thermiques d’un bâtiment.
Quand on sait que chauffer un habitat consiste à compenser ses pertes de calories, on comprend l’intérêt de connaître au mieux le niveau de ces pertes.
Il concerne aussi les niveaux d’émission de Gaz à Effet de Serre (GES). Les classements vont de A à F, A étant le meilleur.
Ce DPE est réalisé par des entreprises spécialisées, habilitées à cet exercice.
Un DPE est valide 10 ans. Il est exigé sur tout le territoire français.
Disons le de suite, ce diagnostic a souvent été épinglé par des organismes tels que “UFC Que Choisir” pour des dérives et/ou absence de sérieux. Les autorités elles-mêmes en ont conscience.
Il est envisagé de le rendre “opposable”, c’est à dire qu’il sera possible de s’appuyer dessus pour gérer d’éventuels conflits entre le vendeur et l’acheteur sur la performance réelle du bien objet de la transaction.
Il faudra, pour que cela soit possible, que ces diagnostic deviennent beaucoup plus fiables qu’ils ne le sont actuellement mi-2018.
Un projet de loi va dans ce sens de l’opposabilité.
Constat de Risque d’Exposition au Plomb (CREP)
Le diagnostic plomb concerne tous les biens dont le permis de construire est antérieur à 1949.
S’il fait état de présence de plomb, sa durée de validité est de 1 an. Par contre, un Crep qui confirme la non présence de plomb selon la réglementation en vigueur a une durée de validité illimitée, ce qui fait que, pour toutes les ventes à suivre, ce Crep sera accepté. Il ne sera pas nécessaire pour toute vente ultérieure d’en produire un nouveau.
Quelles sont les conséquences d’un diagnostic faisant état de la présence de plomb ?
Si le risque est important (peintures au plomb qui s’effritent et présence d’enfants par exemple) le préfet peut notifier à l’acquéreur de “neutraliser” le plomb. Le propriétaire a 10 jours pour dire ce qu’il va entreprendre et un mois pour s’exécuter, faute de quoi le préfet peut émettre une interdiction d’occupation des locaux ou, si l’immeuble est occupé (achat d’un bien loué par exemple), il peut ordonner la réalisation des travaux.
Ces cas de figure extrêmes sont, heureusement, excessivement rares.
L’état mentionnant la présence ou l’absence d’amiante
Ce diagnostic concerne tous les biens dont le permis de construire est antérieur au 1er juillet 1997, date à partir de laquelle l’emploi de l’amiante a été interdit.
L’amiante peut se rencontrer sous 2 formes et les risques qu’il fait courir à ceux qui, alors le côtoient, sont très différents.
Le 1er état, le plus souvent rencontré dans les maisons individuelles, est ce qu’on appelle des éléments non friables. Ce sont, le plus souvent, des plaques à base de ciment armé à l’amiante. La forme la plus courante est ce qu’on appelle “le fibrociment”.
La seconde forme est ce qu’on appelle “un élément friable’. Il s’agit généralement de d’isolants floqués en place. Ils sont très volatiles et l’inhalation des fibres est extrêmement dangereuse.
Les matières non friables peuvent être conservées, elles peuvent être recouvertes.
Il est possible de les déposer soi-même (pdf), en prenant bien sûr toutes les précautions d’usage, entre autre port de masques très sérieux, de type FFP3 et en ne sciant pas, ne coupant pas ou ne cassant pas ces éléments. Une fois déposés, ils peuvent être évacués en déchetterie, si elle les accepte, sinon il faudra les déposer, moyennant paiement, chez un “récupérateur” spécialisé.
Si la maison contient de l’amiante sous forme de matière friable, il sera obligatoire de le faire enlever par une entreprise spécialisée. Elle opérera selon des protocoles très rigoureux.
Électricité
Ce diagnostic de l’état de l’installation intérieure d’électricité est obligatoire pour tout bien de plus de 15 ans et/ou dont le dernier diagnostic pour l’électricité a plus de 15 ans.
Il n’a pas pour objectif de certifier une conformité à la dernière norme en vigueur mais d’estimer et informer du niveau des risques que présente l’installation.
Même une estimation de risque majeur n’empêchera pas la conclusion d’une vente mais permettra au futur acquéreur de savoir, soit par estimation lui-même, soit par consultation d’un professionnel, ce qu’il conviendra de prévoir en terme de travaux.
Gaz
Ce diagnostic de l’état de l’installation gaz est obligatoire pour toute maison dont l’installation au gaz naturel remonte à plus de 15 ans ou n’ayant pas fait l’objet d’un tel diagnostic depuis plus de 15 ans.
Comme déjà dit au sujet de l’électricité, il ne s’agit pas d’un “diagnostic-sanction”. Il signale tout défaut qui pourrait présenter un risque et évalue ce risque.
Ce risque posé, chacun assume ses responsabilités, fait ou non les travaux avant exploitation des équipements en question.
Même en cas de risque très important signalé, il ne peut être fait obligation au vendeur de mettre l’installation hors d’état de risque.
État de l’installation d’assainissement non collectif
Ce diagnostic concerne tous les biens immobiliers non raccordés à un réseau public de collecte des eaux usées.
Ce contrôle est effectué par le Service Public d’Assainissement Non Collectif (Spanc) dont dépend le bien. Il est possible d’en obtenir les coordonnées en appelant les services préfectoraux du département dans lequel se trouve la maison.
Après contrôle de l’installation, le Spanc délivre un diagnostic qui précise si elle présente ou non :
- – des dysfonctionnements
- – et/ou des risques pour la santé ou l’environnement.
En cas de défaillance, les travaux de remise en état de fonctionnement correct sont, théoriquement, à la charge du vendeur. Celui-ci peut ne pas les réaliser. Dans ce cas, il doit en prévenir l’acheteur. Il aura alors un an pour se mettre en conformité avec le SPANC
État relatif à la présence de termites
Ce diagnostic est obligatoire dans les régions déclarées “infestées” par les termites.
Il doit être réalisé par un professionnel certifié.
Ce document précise l’adresse du bien, les éléments contrôlés et ce qui a été constaté (présence ou non de termites). Sa validité est de 6 mois. Si le vendeur ne fournit pas de diagnostic et qu’il est constaté a posteriori que le bien bien était infesté, il peut être poursuivi en justice.
État des servitudes « risques » et d’information sur les sols (ESRIS)
Cet état ESRIS est à fournir dans les zones concernées par un risque soit naturel et prévisible, soit d’anciennes exploitations minières ou autres excavations, soit dans les régions à activité sismique possible, soit en cas d’exposition à un risque technologique, plus généralement en toute présence d’un risque possible et identifié.
La préfecture du lieu est en mesure de dire si le bien ciblé est dans une de ces zones à risque.
Les documents d’urbanisme, Schéma local d’urbanisme, Plan Local d’Urbanisme (PLU) sont la base même de collecte possible de ces renseignements.
Le document ESRIS (pdf) est à remplir par le vendeur lui-même.
Mérule
Ceci concerne les maisons situées dans une zone à risque ayant fait l’objet d’un arrêté préfectoral. Celui-ci est affiché en mairie. A défaut, celle-ci sera en capacité de donner l’information si la maison se situe ou non dans une telle zone.
Pour toute maison située dans une de ces zones, la loi fait obligation d’avertir l’acheteur de ce risque.
Si la loi n’oblige pas à un véritable diagnostic, nous conseillons vivement aux vendeurs de faire réaliser un diagnostic par une entreprise compétente et à l’acheteur de ce même bien de le réclamer.
Il est prévu des poursuites à l’encontre de qui, vendant un bien sis dans une zone à risque, n’en n’aurait pas averti l’acheteur.
Radon
L’établissement d’un diagnostic radon est en attente de décret d’application (Ordonnance 2016-128 du 10 février 2016).
Lorsqu’il sera publié, ce diagnostic radon sera probablement rattaché au document ESRIS.
A ce jour, rien n’oblige à son établissement.
Néanmoins nous le conseillons très vivement ..
Attestations d’assurance
Si des travaux récents sont mis en avant, entre autres pour justifier du prix demandé, il est nécessaire que le vendeur fournisse les attestations d’assurance les concernant (travaux de moins de 10 ans pour le gros œuvre, moins de 2 ans pour le second œuvre).
S’il ne les a pas, l’acheteur sera fondé à lui demander les factures concernant ces travaux.
S’il a lui-même réalisé les travaux, l’acheteur sera fondé à lui demander une attestation sur l’honneur décrivant les travaux et la date à laquelle ils ont été réalisés.
Travaux soumis à déclaration ou à demande de PC
Si des travaux visibles de l’extérieur, d’agrandissement ou permettant le changement de destination de locaux ont été réalisés (tous ceux qui auront déclenché une déclaration de travaux ou une demande de PC) ont été réalisés, une déclaration d’achèvement desdits travaux a dû être déposée en mairie. En demander le récépissé.
Servitudes
Si des servitudes nouvelles sont générées du fait de la vente (par exemple : droit de passage suite à partage en 2 lots d’une parcelle initiale), elle devront être précisées dans l’acte notarié.
Administratif : ce qui n’est pas obligatoire
Certaines analyses, certains diagnostics ne sont pas obligatoires mais pourraient cependant être très utiles, nous allons passer en revue ceux que nous vous conseillons.
Loi Carrez
Cette loi Carrez, du nom de son initiateur, Gilles Carrez, a pour but de déterminer la surface privative de chaque lot dans une copropriété. Dans l’immense majorité des cas, elle ne concerne donc pas la maison individuelle … sauf exception.
En effet, la plupart des copropriété sont édifiées verticalement, par empilage d’étages donnant corps à des unités d’habitation dites “appartements”.
Cependant, des opérations de copropriété peuvent aussi se développer à plat, on parle alors de copropriété horizontale. Leur originalité de jouissance exclusive tant d’un bien immeuble que d’une surface de foncier sur lequel il est édifié ne l’exonère pas d’une déclaration conforme aux prescriptions de la loi Carrez.
Même pour les maisons individuelles classiques (indépendantes) et donc non soumises à la loi Carrez, nous conseillons à tout acheteur de se faire remettre un document annonçant les surfaces de la maison, pièce par pièce ainsi que la surface du terrain d’assiette.
Ce document ne sera pas un support qui permettra un recours face à des surfaces “gonflées”, mais il peut “calmer” les ardeurs d’un vendeur.
Surface terrain, bornage
Un terrain a des “frontières” et il devrait être délimité dans sa surface par des bornes. Nous disons “il devrait” car il n’y a pas d’obligation de bornage, ce qui peut être source d’ennuis entre voisins : “Qui est propriétaire de la haie séparative ?”, “Où commence mon terrain ?”, “Où s’arrête celui de mon voisin ?”, “Qui doit entretenir le mur mitoyen ?” …
Le plan du terrain (pouvant comporter plusieurs parcelles) et les extraits cadastraux de la ou des parcelles seront annexés aux actes authentiques établis par le notaire.
Il est sécurisant de connaître leur forme, leurs limites et leur contenance avant même la signature du compromis. Nous conseillons de demander le N° de section et le(s) numéro(s) de(s) parcelle(s). Avec ces renseignements il est très facile de vérifier les dires du vendeur ou de son mandataire en s’adressant directement au “cadastre”.
Idéalement si le terrain n’est pas borné à l’achat, nous conseillons vivement de le faire. Cela évitera tout conflit de voisinage à l’avenir.
Servitudes
Il s’agit de droits soit concédés dans le passé à titre onéreux ou même acquis de fait par l’usage ou, pour le passage, du fait d’un enclavement.
Ces droits, qui peuvent être de surface (droit de passage par exemple) aériens ou souterrains (passage de canalisation, réseau d’eau, d’électricité, téléphone ou autres.
Ils peuvent parfois représenter un réel handicap à l’exploitation et/ou à la revente.
Il est très difficile de connaître par avance les servitudes d’un terrain.
Nous conseillons, en cas de doute, d’ajouter une condition suspensive dans la rédaction du compromis. Elle peut être très simple : “sous réserve d’absence de servitude qui pourrait être une gêne ou un handicap à la gestion, l’entretien et/ou la revente du bien”.
A titre personnel
Nous venons de lister ce que le vendeur est en obligation de fournir ou que nous conseillons à l’acheteur de demander.
Il n’y a qu’une obligation de l’acheteur vis à vis du vendeur, elle n’est d’ailleurs que morale.
Financement
Signer un compromis n’est pas un acte anodin, il engage l’acheteur à acheter dès lors que les éventuelles conditions suspensives auront été levées et il bloque la possibilité pour le vendeur de continuer à chercher un autre acquéreur.
Il est donc moral que l’acheteur se soit, préalablement, inquiété de ses capacités de financement.
Cette démarche est assez simple. Il suffit de rencontrer sa propre banque ou un autre organisme et de faire le point avec un conseiller compétent. Cette démarche peut permettre d’éviter de nombreux désagréments.
Conclusion
Nous venons de faire un passage en revue de tout ce qui encadre administrativement l’achat d’une maison.
Ne reste plus à l’acquéreur, dès la signature des actes, qu’à assurer son bien et à en assumer toutes les charges.
Au titre de celles-ci, on trouve le règlement des taxes foncière et d’habitation (au moins pour le temps de son maintien en ce qui concerne cette dernière).
Ces taxes seront à la charge du vendeur avant la date de la signature des actes authentiques et à la charge de l’acquéreur pour la suite, ceci au prorata temporis.
Les calculs de répartition seront faits par le notaire.
Enfin, puisque nous citons l’officier ministériel, le notaire, c’est aussi lui qui collectera les taxes liées à la transaction.
Même si ça n’est pas le sujet, nous souhaitons préciser ici qu’il ne faut pas parler de “frais de notaire” mais de “frais d’acquisition”. En effet, si c’est bien lui qui les collecte, une partie seulement lui reviendra.
Si tout est fait comme le législateur a voulu l’encadrer, il y a toutes chances que l’acte d’achat soit le point de départ d’une longue et agréable jouissance du bien acquis.