Tout inventeur a pensé de façon non conformiste. Peut-on en déduire que si tout le monde se conforme à l’existant, alors les choses sont condamnées à être figées ?
Les américains disent des gens qui n’hésitent pas à penser de façon non conforme, qu’ils sont “thinking out of the box !”
Pour ma part, je n’accepte pas naturellement le conformisme, je ne m’y conforme que si, après réflexion et analyse, je ne trouve pas mieux… et encore, je ne m’interdis pas de changer d’idée !
Dans cet article je vais expliquer en quoi je pense “hors de la boîte” pour nos habitats et pourquoi j’agis ainsi.
Attendu que je n’aime pas cheminer seul, j’espère que nous ferons un bout de chemin ensemble.
Qu’est-ce qu’une box ? Qu’est-ce que le conformisme ?
En terme de pensée, c’est un contenant, des étagères bien ordrées ; des concepts de solutions, d’orientations, de directives, de règles, de normes ; des dossiers rangés, classés, auxquels on peut se référer …
Très confortable, voire super sécurisant ; pas besoin de penser, on m’explique, on m’accompagne … on me tient la main et on me dit ce que je dois faire !
Je ne peux plus me tromper puisque je respecte des directives … et en plus, si ce n’est pas bien, ma responsabilité ne sera pas engagée, j’aurai fait tout ce qu’on m’a dit, comme on me l’a prescrit ! Dit autrement, même si je ne suis pas sûr que c’est bien, je ne me “mouille” pas.
… Mais au fait, qui m’a consulté ? Qui pense pour moi ? Qui décide pour moi ?
On me guide, on m’oriente, fort bien, mais qui écoute mes aspirations, qui analyse mes besoins, qui décide ou a décidé ce qui serait bien pour moi et mon habitat ?
Et le conseil, c’est quoi ? Il commence et il s’arrête où ? Il vient d’où ? Me sert-il réellement ? Sert-il réellement mon client ? Respecte-t-il mon habitat ou celui de mon client ?
Sur quoi est-il basé ? Qui a imaginé les règles auxquelles je me soumets ?
Préambule
Non pas que je sois keynésien, ce qui équivaudrait à faire mienne une des approches de l’économie alors même que, quels qu’en soient les courants, telle qu’elle a été enseignée, appliquée, l’économie nous a amenés dans la situation actuelle, c’est à dire aux prémices de son effondrement et de celui de la société qui s’est organisée à sa (leur) suite.
Cependant il faut s’inspirer de ce qui peut être inspirant.
Ma pensée tient dans une affirmation, ou plutôt un constat de Keynes, extrait de son ouvrage « Sur la monnaie et l’économie” : “ Hélas! un banquier « sain » n’est pas un homme qui voit venir le danger et l’évite, mais quelqu’un qui s’il est ruiné, l’est conformément à toutes les règles et traditions et en compagnie des autres membres de la profession, en sorte que personne ne peut rien lui reprocher.”
Dit autrement et appliqué à d’autres cas que le banquier :
“Il est moins risqué de se fourvoyer dans l’échec en suivant les normes que de tenter de réussir en ne s’y conformant pas !”
Qu’est-ce que penser conformément ?
Se conformer à la pensée commune, c’est respecter la pensée considérée comme légitime.
Qu’est-ce qu’une pensée légitime ?
C’est une pensée qui a été déclarée comme la seule devant être suivie car si elle est dite légitime c’est qu’elle a été légitimée.
- Elle peut l’être soit par une autorité politique, laquelle, par nature (je devrais plutôt dire par application de la constitution), a en effet toute autorité à le faire. En république, elle est censée le faire au nom du peuple…
- Elle peut l’être aussi par des groupes représentatifs suite à un transfert de pouvoir de la part du gouvernement.
- Certains espèrent qu’un jour toute pensée censée, utile au bien commun, d’où qu’elle vienne, soit admise comme étant légitime. La difficulté pour ce cas d’espèce est de déterminer les critères qui donneront pouvoir de légitimation… très difficile car les pensées étant multiples et, parfois, opposées, qui a raison et/ou comment déterminer où est la raison : “le plus grand nombre ?” ; “par majorité absolue ou relative ?” ; “par consensus ?” ; …
Quelle légitimité ?
La légitimation peut être issue d’une loi élaborée par les autorités supérieures que sont le législateur (en France le terme législateur désigne le parlement, lequel est constitué des deux chambres que sont l’Assemblée Nationale et le Sénat).
Attendu que nous sommes un état de droit, je pense que la loi doit être respectée… sauf à être inique (à titre d’exemple je citerai volontiers les lois antijuives promulguées par le gouvernement français du temps de l’occupation lors de la seconde guerre mondiale).
Les influenceurs, les rédacteurs de labels peuvent parfois revendiquer une légitimité, surtout si le groupe qui a présidé à la mise au point de ce qui doit être appliqué l’a fait suite à un transfert de pouvoir de la part d’une autorité supérieure, entre autres et par exemple, par le gouvernement lui-même.
Des groupes, suffisamment forts pensent-ils, parfois convaincus de cela du fait d’un nombre important de membres, s’arrogent une légitimité autoproclamée. Je ne pense pas que ceci soit acceptable. Peut-être pourrait-on, depuis un certain nombre de signataires d’une demande, déclencher une action visant à légitimer ou non la pertinence de cette demande (ce que certains appellent le Référendum d’Initiative Populaire) et, selon les résultats, en confier l’étude et la mise au point à un groupe “compétent” tel que décrit ci-avant… Encore faudrait-il, pour ce faire, que le législateur ait envie de déléguer une partie de ses pouvoirs !
Forts de cette légitimité, ce qui ressort de la réflexion des groupes légitimes devient une sorte de règle, écrite ou pas, qu’il serait possible de qualifier de “norme”, “bien-pensance”, “convention”…cette dernière expression est celle que je retiens car c’est bien ce dont il s’agit : des règles élevées au rang de quasi-diktat et qui, le plus souvent, devront être appliquées car il aura été convenu que c’est ce qui est le mieux… reste à déterminer si le “mieux” est réel !
Peut-on s’affranchir de ce qui constitue la convention ?
Tel que décrit ci-avant, les règles sont imposées par la loi, par décret ou par directives émanant de groupes légitimement constitués.
Est-ce à dire qu’on ne peut pas y déroger ? Oui et Non !
En effet et par exemple, pour qui veut bénéficier d’aides pour l’amélioration thermique des bâtiments, il faudra :
- que les travaux soient réalisés par un artisan reconnu RGE,
- avec des matériaux bénéficiant d’agréments ou certifications accordés par des groupes autorisés à le faire (le CSTB par exemple),
- en respect de règles de mise en œuvre également dûment validées,
- respecter les “dimensionnements” nécessaires pour atteindre les objectifs légalement fixés.
Toujours selon l’exemple ci-dessus, quiconque est prêt à ne pas percevoir les aides pourra réaliser ou faire réaliser les travaux par qui il veut, comme il l’entend, avec les matériaux et techniques de son choix, dans les dimensionnements qui lui conviennent, sans pour autant risquer les foudres des autorités. Il n’aura simplement pas bénéficié des aides et il devra, dans certaines circonstances, faire face à des contraintes diverses.
Pourquoi penser hors la boîte ?
Certains diront “Les règles sont établies pour le bien commun, alors pourquoi chercher à y échapper ?”.
Qu’il serait agréable que ce soit toujours ainsi ! Hélas, nous ne vivons pas dans un monde de bisounours !
Pour des raisons que je ne connais pas, même s’il n’est pas interdit de nourrir des doutes, le gouvernement vient, en ce début d’automne 2020, de confier les rênes de la lutte contre les passoires énergétiques à … Saint-Gobain !
Or, comme chacun sait, Saint-Gobain est un acteur majeur du monde du bâtiment, leader de la production de la laine de verre, elle-même leader du marché, qu’il produit et vend via sa filiale Isover®.
Cet industriel est également leader du matériau de parement le plus répandu, la feuille de plâtre cartonné, ceci avec ses productions vendues élaborées et vendues par sa filiale Placoplatre®.
J’ai produit des textes et des vidéos qui décrivent en quoi ces matériaux ne sont pas les meilleurs dans leur secteur propre pour atteindre l’objectif N°1 des Français, le confort.
J’ai aussi produit des vidéos qui expliquent comment les calories migrent (convection, conduction, rayonnement) et ces supports mettent en évidence que, non seulement les matériaux produits et vendus par cet industriel ne sont pas, globalement, les plus performants mais aussi et, peut-être surtout, qu’ils ne répondent pas à tous les critères qui devraient être pris en compte (pour l’été, le déphasage entre autres).
Cette position de pilote a permis, dans le passé car ce n’est pas une première, et va permettre à cet acteur d’orienter vers des règles faisant la part belle à ses produits, entre autres le lambda, délaissant les autres critères que sont la densité, la chaleur spécifique, la perméance, les capacités de sorption et désorption, la durabilité, la recyclabilité, l’origine des ressources, l’énergie nécessaire à la production …
Alors, sous prétexte que ceci aura été gravé dans le marbre, que fait-on ?
On s’inscrit hors de la bien-pensance, hors de la convention, on cherche d’autres pistes, plus pertinentes.
Mon livre paru aux éditions Terre vivante “Maison écologique, construire ou rénover ?” a été rédigé dans cet esprit : ne pas se mettre hors la loi mais, dans le cadre de ce qui est autorisé, privilégier ce qui semble le plus pertinent !
Conclusion
Puisque, tel que je l’ai décrit ci-avant, les règles du jeu n’ont pas évolué :
- les incitations et orientations déjà conseillées par le passé et qui ont amené la preuve de leur inefficacité,
- quasiment rien de ce qui sert à “accorder” ou reconnaître” les compétences aux opérateurs n’a été changé,
- les produits qui répondent le mieux aux critères retenus comme cibles principales et quasi uniques (exemple, pour l’isolation : le lambda et le R) ont déjà été largement utilisés et que les résultats constatés sont loin d’être à la hauteur des attentes,
sauf à me tromper, ce que j’espère sincèrement :
- les incitations financières qui en ressortiront, orienteront probablement vers les mêmes cibles…
… peut-on béatement, en attendre des résultats différents ?
NON bien sûr, Einstein l’a lui-même fort bien formalisé : “La folie, c’est se comporter de la même manière et s’attendre à un résultat différent.”
Puisqu’il est possible de penser autrement, de se comporter et d’agir différemment, donc d’espérer des résultats meilleurs, alors oui, je suis “thinking out of the box” !
Par contre, légaliste je suis, et légaliste je resterai. Je vous promets :
- toutes dénonciations qui permettront de remettre les pendules à l’heure,
- des approches basées
- non pas, comme la plupart du temps, sur des matériaux et/ou techniques que l’on cherche à faire coller à la résolution de problèmes,
- mais partant du constat d’un problème ou de l’attente des occupants et…
- sur une analyse la plus exhaustive possible,
- sur le contrôle du besoin, de sa légitimité,
- sur la recherche et l’analyse de mise en évidence des effets désirables et … indésirables,
- des propositions qui répondent aux besoins des occupants :
- sans risque pour leur santé ou leur sécurité,
- sans risque pour leurs habitats, tout particulièrement en garantissant leur pérennité,
- sans risque pour leur environnement au plus proche
- sans risque pour l’environnement en général,
- sans consommation irraisonnée de ressources et, entre autres, sans un amortissement positif en comparant économies de ressources à l’exploitation et les consommations à la réalisation,
- sans risque pour le climat,
- en respect des générations futures, particulièrement en leur permettant de disposer de ressources suffisantes pour faire face à leurs besoins.
Suis-je disruptif ?
Oui, je crains de l’être ; je dis “je crains” car j’ai l’impression que nous sommes très peu à penser ainsi, ce que je déplore.
Je vous propose de ne pas suivre les injections ou incitations n’allant pas dans le sens de ce que j’ai développé dans ma conclusion.
Je vous propose de me rejoindre dans cette approche, difficile mais tellement plus pertinente : la recherche du juste équilibre entre la réponse à un besoin réel et le respect des propositions précédentes.
Crédit photo : Pixabay kalhh, yogendras31, analogicus, Michael_Luenen
Bonjour Claude,
Sous quel "mandat" St Gobain a-t-il obtenu cette responsabilté ?
Merci encore de faire part au plus grand nombre l'art de la chasse aux calories perdues et, ici, à celle de la bien pensance
Dombec
Bonjour Dombec, merci de votre participation au débat,
En ce qui concerne la main mise de Saint-Gobain sur la rénovation énergétique des logements les plus déficients dans ce domaine, je pense que plusieurs pistes sont à imaginer :
– le gouvernement se saisit d’un sujet qui fait consensus et, si on le pense sincère, cherche des solutions dont il n’a pas les moyens et donc les confie à qui veut bien les prendre en charge, « St-Goabin ou un autre, peu importe, on fait quelque chose et on espère aider les plus démunis »,
– le gouvernement se saisit d’un sujet qui fait consensus et, ne voulant ou ne pouvant pas s’en occuper, refile la patte chaude à un acteur qui aura les moyens de faire le buzz faute de, possiblement, faire le job, ainsi il occupe l’espace médiatique à moindre frais, accessoirement ça pourrait calmer les contestataires, vous savez, les gens en jaune sur les ronds points, c’est encore frais et, déconfinement oblige,, on ne sait jamais, ça pourrait redémarrer… « Hé, on pense à vous, on va améliorer vos habitats « …
– Eventuellement, on peut cumuler l’une des 2 options précédentes avec une supplémentaire,taire : on favorise une entreprise du CAC40, on sert un peu les copains, ils pourront renvoyer l’ascenseur en d’autres circonstances (voir on renvoie l’ascenseur car l’autre a déjà fait sa part !)… Mais là, je deviens mauvaise langue !
Le mandat est simple : Pierre André de Chalendar, pdg de Saint-Gobain, est nommé officiellement à la tête de la commission.
Ce n’est pas vraiment le groupe en tant qu’entreprise qui est nommé, mais attendu que P.A. de Chalendar est avant tout pdg du groupe, qu’il perçoit, à ce titre, des émoluments importants, qu’il a en charge le bon fonctionnement du groupe (ce qu’il fait d’ailleurs bien), qu’il se doit de satisfaire ses investisseurs et distribuer des dividendes, faute de quoi il lui sera demandé de rendre des comptes sur le temps consacré à la commission, imaginée par le gouvernement, il est, de facto, en situation de devoir favoriser son groupe, St-Gobain… Mettre les moyens du groupe au service de la commission et en retirer des influences pour développer son propre marché… voilà ce qui, à mon avis, est une possibilité… fort probable !
Je l’ai d’ailleurs dénoncé, avec, dans le titre, les termes « conflit d’intérêt » car je crois que, même si tout est légal, il y aurait beaucoup à dire au plan moral : https://www.soigner-l-habitat.com/saint-gobain-a-la-tete-du-plan-de-renovation-energetique-pourrait-il-y-avoir-conflit-dinteret/
Merci Claude pour ces explications…
Du coup j'ai revu mes devis pour l'isolation de mes combles effectuées au début de l'année. L'entreprise (IsolaSud-ouest) m'a proposé en aout 2019 de la SUPAFIL Loft 045 fabriquée par KNAUF INSULATION (Pas St Gobain), pour 1€ (1217€ pour le mandat TOTAL et 890€ financés par l'entreprise elle-même…?, donc il me restait 1€ pour 100m2)
comme la réalisation tardait à venir, j'ai consulté ce que je trouvais sur internet et tombais sur un article d'un certain papy Claude, traitant, entre autres, du déphasage.
J'ai donc recontacté l'entreprise pour me chiffrer de la ouate de cellulose (Grey snow de chez Igloo France), en place de la SUPAFIL. La participation de l'entreprise est tombée à 147€ et j'ai dû payer 1100€.
Donc, ici pas de trace de St Gobain, mais si cela peut servir à votre combat…
Bonne continuation
Merci Dombec,
Je connais bien la ouate de cellulose qui a été mise en œuvre dans vos combles : vous en serez heureux !
Je suis surpris de cette différence faite dans le financement par l’entreprise car votre isolant est connu et reconnu par les autorités certificatrices et dispose à la fois d’une agrément CSTB et d’un classement ACERMI, les deux sésames nécessaires pour la prise en compte d’un isolant n’intégrant pas le DTU « isolation en combles », ce qui est le cas de toutes les ouates (entre autres produits refusés par le CSTB, le plus souvent pour des arguments fallacieux, sachant le groupe qui valide les produits est largement sous la coupe de fabricants d’autres produits …
On en revient toujours au même, « à qui profite le crime ??? »
Bonjour Claude,
Tu as écrit tellement de choses que je découvre encore cet article écrit en fin 2020, une éternité semble-t-il ?
Comme toi, je suis en dehors du conformisme.
Je souhaite t'interpeler sur le paragraphe "Quelle Légitimité ?". Tu y parles de du Référendum d'Initiative Populaire. Cette procédure entrée dans la législation est en fait très difficile à mettre en œuvre (expérience sur la contestation de la privatisation d'un aéroport non aboutie).
Il existe un instrument bien plus simple, à la portée des citoyennes et citoyens, au niveau local, départemental, régional, national voire international. C'est le RIC (Référendum d'Initiative Citoyenne). La présentation faite sur le site du gouvernement est bien trop limitée (https://www.gouvernement.fr/le-ric-de-quoi-s-agit-il).
Une présentation plus affinée est faite sur https://www.ric-france.fr/ric-referendum-initiative-citoyenne.
Il était au programme de tous les partis en 1993.
Sur Toulouse, le média https://frontmediatique.fr/ en a parlé : voir https://frontmediatique.fr/%f0%9f%92%a1-penseur-heterodoxe-66-%f0%9f%97%a3-clara-egger-%f0%9f%8e%af-pour-que-voter-serve-enfin-manifeste-pour-une-transition-democratique-%f0%9f%93%86-23-05-2022/
Merci Jacqueline pour cette information