Aujourd’hui, j’ai envie de vous parler des difficultés rencontrées par les architectes dans leur métier.
Au cours de ma carrière, j’ai été témoin des difficultés rencontrées par les architectes et leurs clients.
Nous sommes face à une incompréhension totale : les particuliers disent avoir besoin d’être accompagnés et conseillés, mais ne trouvent personne !
Pourtant, l’architecte est sûrement la personne qui a le plus large éventail dans le domaine du bâtiment !
Il faut remédier à ça !
J’explore donc dans cette vidéo et cet article plusieurs causes qui, selon moi et d’après mon expérience, les mettent parfois en difficulté dans l’exercice de leur profession auprès des particuliers.
La compréhension mutuelle entre les compétences d’un architecte et les attentes d’un client
Les architectes font un nombre d’années d’études assez important (5 ans), ils sortent diplômés d’état et après faut encore quelques années en cabinet d’architecture pour avoir la compétence de la conduite du chantier. Ce n’est pas rien ! On leur enseigne beaucoup de choses très intéressantes liées à la conception d’une enveloppe dans laquelle on va vivre, donc comment dessiner une belle enveloppe, les déplacements dans l’espace, la gestion de la lumière, la gestion des lieux, les orientations,..tout ça indéniablement ils savent le faire sauf qu’ils sont quand même assez peu orientés dans leurs études sur le bâti ancien.
Il y a incompréhension entre ce que le particulier vient chercher chez l’architecte et ce que l’architecte est en capacité de lui donner. Pour autant, ce que l’architecte a appris est utile mais ce que nous essayons de faire dans nos formations, c’est précisément d’apporter un peu de ce complément sur le bâti ancien :
- Comment fonctionne un mur en physique
- Comment fonctionne un mur en pierre
- Quels sont les contraintes d’une charpente à chevrons forme en ferme ou avec des pannes traditionnelles pannes chevrons ou en fermette
- Quels sont et quels peuvent être les méfaits d’un enduit ciment sur un mur en pierre ou en bauge
- Les remontées capillaires
- Le fait que ce qui a été construit avant 48 en règle générale, c’est ce qu’on appelle les fondations cyclopéennes, donc pierre plate sur lit de sable
L’arbitrage entre aspect moderne et respect de l’ancien, entre durabilité et innovation
Le particulier achète une ancienne ferme, une ancienne gentilhommière, une maison d’ouvriers avec une architecture qui est datée par rapport au moyen technique de l’époque, au savoir-faire des hommes de l’art disponibles, aux matériaux disponibles localement, aux contraintes climatiques.
Aujourd’hui, avec certains matériaux modernes, il est possible de se libérer d’une architecture qui était largement dictée par des contraintes environnementales diverses. On peut parfaitement marier du contemporain avec de l’ancien et faire quelque chose d’extrêmement beau sauf que le particulier n’y est pas forcément prêt et que l’architecte est plutôt une personne qui va travailler sur la beauté du geste, sur la beauté de ce qui va être produit; il va donc essayer d’amener une touche de modernité.
L’entente et la coordination avec les autres corps d’état
Sujet assez sensible ! Il faut que l’architecte comprenne qu’il peut avoir des exigences techniques d’aspect mais que l’artisan ne peut pas tout réaliser (normes, contraintes ultérieures,..). Il faut aussi écouter l’artisan, entendre ses capacités techniques.
Il faut aussi que l’artisan comprenne que l’architecte n’est pas là pour l’embêter, que l’architecte a une raison d’être là, qu’il faut coordonner tous les corps d’état.
Le respect des réglementations et des codes de construction
On a tous des contraintes.
L’architecte doit prescrire des solutions qui sont couvertes et prises en compte par les assurances, sa décennale. L’artisan doit aussi amener des solutions qui vont être couvertes par sa décennale.
Mais, le client a aussi des attentes. Il peut prendre la responsabilité de dire « moi j’accepte le risque » mais ce n’est pas simple à gérer pour un architecte et le client doit le comprendre.
De mon point de vue, on peut avoir deux positions en tant que professionnel :
- Dire que ce n’est pas du tout adapté aux besoins, que ça ne correspond pas aux contraintes du bâtiment
- Soit lui dire d’accord, mais ça ne va pas être simple et donc et là il est nécessaire d’avoir à la fois la prise en considération des lieux, c’est à dire bien voir ce que ça va représenter comme contraintes. Il est important d’annoncer les contraintes aux clients, de dire on va regarder avec l’artisan et on va voir ce qui est possible de faire.
Un habitologue va être en capacité d’expliquer les limites de faisabilité, il va faire une analyse. L’architecte peut alors trancher, trouver l’artisan qui va mettre en œuvre, coordonner son intervention avec les autres. Je pense qu’il y a vraiment une complémentarité très grande. Les architectes doivent comprendre les habitologues ne sont pas des concurrents. Aucun habitologue n’a prétention à être architecte, ce serait ridicule, comment pourrait-on en quelques mois de cours en distanciel transmettre le savoir qu’un architecte acquiert en 5 ans ? Mais comment un architecte pourrait-il passer énormément de temps à expliquer ce qu’est une remontée capillaire et sous prétexte qu’il a la coordination totale ne pas se faire payer pour l’explication qu’il a donné ? Chacun doit avoir sa place.
La contrainte budgétaire
Un architecte est comme un chef d’orchestre.
Un chantier se passera beaucoup mieux si le client sait ce qu’il veut.
On a toujours une bonne raison pour dire « j’aurais peut-être pu m’en passer » ou « je vais peut-être pouvoir m’en passer parce que finalement mon budget est limité et je vais quand même économiser 15000€ ou 20000€ ou 30000€ de coordination, de conception,… »
Moi, je dirais que plus un budget est serré, et plus il est impératif de ne pas se tromper ! « Il faut être riche pour acheter deux fois ».
Pour aller plus loin dans cette réflexion, je vous invite à regarder ma vidéo sur ce sujet.